AU P\'TIT BONHEUR

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- INTERVIEW de Sigourney Weaver l' actrice qui joue l'autiste dans le film "Snow Cake"

Sigourney Weaver : "Jouer une autiste était un pari"
Dans Snow Cake, Sigourney Weaver joue le rôle d'une autiste. Une authentique performance qui n'est pas due au hasard. L'actrice explique avec passion comment elle a abordé ce rôle difficile et le monde de l'autisme.

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Pour l'éternité elle restera Helen Ripley, chasseuse d'Alien et survivante invétérée. Heureusement Sigourney Weaver a su ne pas disparaître derrière ce rôle iconique. Elle fut Diane Fossey dans le très beau Gorilles dans la Brume, ou encore Paulina Escobar, femme torturée par un régime totalitaire dans La Jeune Fille et la Mort. Elle sut aussi s'aventurer dans la comédie avec SOS Fantômes, Beautés empoisonnées, et surtout l'hilarant Galaxy Quest. Changement de registre avec Snow Cake : elle s'attaque au rôle d'une mère autiste qui perd son enfant dans un accident de voiture. Sigourney Weaver était à Paris pour présenter le film...

 

Dans un film, d'ordinaire, les personnages évoluent, modifient leur comportement. Le vôtre non...

C'est vrai. Elle ne change pas au sens où on l'entend d'habitude. Mais Linda est quand même perturbée par sa rencontre avec Alan (l'homme impliqué dans l'accident de sa fille. NDLR). Elle n'est plus exactement la même une fois qu'il est parti.

Photo © Patrick Davy / Eliot Press

 

Comment avez-vous réagi à la lecture du scénario ?

C'est mon ami et partenaire de jeu Alan Rickman qui m'a envoyé le scénario, en pensant que ce projet pourrait m'intéresser. J'étais étonnée que l'on pense à moi pour un tel personnage. J'ai trouvé l'histoire assez drôle, dénuée de sentimentalisme. Surprenant de la part d'un auteur aussi jeune...

 

Comment avez-vous abordé ce rôle difficile ?

J'ai pris mon temps pour étudier attentivement les autistes et leurs familles. Cette phase d'observation a duré plusieurs mois. Je me suis confrontée à différents stades d'autisme. Puis j'ai fait la connaissance d'une femme atteinte de cette maladie. C'est elle, finalement, qui m'a le plus inspirée. Elle a nourri mon personnage. Mais cela restait un vrai pari et une grande responsabilité. Heureusement, le tournage a été sans cesse repoussé : ça m'a permis d'entrer dans le rôle.

 

L'autiste n'est pas représenté seulement comme un être vulnérable et assisté. Son détachement systématique lui confère aussi une vraie force. C'est une nouveauté au cinéma...

Oui, il n'y a pas besoin de passer beaucoup de temps avec les autistes pour se rendre compte qu'ils sont forts. Ils peuvent même être méchants, ou très manipulateurs pour parvenir à leurs fins. Mais ils sont innocents dans leur méchanceté. Pour eux, utiliser les gens tient de la nécessité. De la survie. Ils sont très clairs à ce sujet avec leur entourage. Cette attitude pragmatique impose le respect.

 

© MK2 Diffusion
"J'ai pris plusieurs mois pour observer attentivement les autistes et leurs familles"

Faire autre chose que Rain Man

Comment sort-on d'un tel rôle ?

Je n'en suis jamais totalement sortie. Le tournage du film s'est déroulé à Wawa dans l'Ontario, loin de tout et de tous. Le soir, je ne retrouvais ni mon mari, ni mes enfants. J'ai donc pu m'immerger totalement dans le rôle et devenir moi-même un peu autiste. Etre Linda a été une expérience des plus enrichissantes. J'ai appris à considérer les objets et la vie d'un tout autre œil. Malheureusement, j'ai perdu ce regard sur les choses une fois le film terminé...

Le film comporte une scène très drôle. Linda joue au Scrabble avec Alan mais seulement avec des mots inventés. Et lorsque les règles sont les siennes, elle prend le dessus. Qu'apporte cette scène au film ?

On peut penser que Linda a des problèmes. Mais elle peut aussi être très à l'aise, en possession de tous ses moyens. Comme tous les autistes d'ailleurs. Dans cette scène, elle et Alan sont enfin à égalité. Elle finit même par le dominer. C'est vraiment une très jolie scène.

 

Quels rapports entreteniez-vous avec Ros Blackburn, l'autiste qui vous a aidée sur ce film ?

Ros Blackburn est une autiste mais elle donne des conférences. A force de persévérance, elle a appris à dialoguer avec le reste du monde. Ce sont ses parents qui, conscients de ses capacités, l'ont forcée toute petite à parler. Même si elle n'était pas sur le tournage, Ros était très impliquée et m'a énormément aidée. Tout le monde voulait faire autre chose que Rain Man. C'est un très beau film mais qui traite d'un cas très particulier chez les autistes : le génie. Nous voulions creuser autre chose : la plupart des autistes n'ont pas des capacités intellectuelles surhumaines.

Photo © MK2 Diffusion
"Nous devons accepter les autistes tels qu'ils sont"

 

Aviez-vous déjà été sensibilisée à ce handicap ?

J'étais un peu concernée par le problème. Je croyais même tout savoir. Pourtant, quand on a dit "autisme", on n'a rien dit... Jouer une autiste m'a permis de prendre conscience de beaucoup de choses. Et finalement, ce qui me touche aujourd'hui, c'est l'ignorance des gens par rapport à cette maladie. Lorsque je jouais Linda, j'avais peur d'en faire trop ou moins, pour la rendre acceptable. Erreur : nous devons les accepter tels qu'ils sont.



23/03/2009
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